[AVIS CINEMA] - #12 - FÉLIX ET MEIRA : à bas les clichés romantiques !

FÉLIX ET MEIRA - Drame - Sortie le 4 Février 2015 - 01h45 -  Avec :  Hadas Yaron, Martin Dubreuil, Luzer Twersky

** SYNOPSIS ** Tout oppose Félix et Meira. Lui mène une vie sans responsabilité ni attache. Son seul souci, dilapider l'héritage familial. Elle est une jeune femme juive hassidique, mariée et mère d’un enfant, s’ennuyant dans sa communauté. Rien ne les destinait à se rencontrer, encore moins à tomber amoureux.

Ce film est une immersion dans la communauté juive hassidique à Montréal, très fermée, peut-être la plus fermée au monde. FÉLIX ET MEIRA, c'est aussi une histoire d'amour entre deux êtres éloignés mais complémentaires. Plongeons sans plus attendre dans cette petite pépite québécoise.

Le film n'aurait jamais existé sans la curiosité du réalisateur Maxime Giroux qui vit dans le quartier où douze communautés cohabitent. La communauté hassidique est celle qui suscite le plus de questions, et donc la plus intéressante à raconter. Notamment la condition des femmes et surtout, comment tomber amoureux. Pendant trois ans, Maxime Giroux s'est immergé dans cette communauté avec l'aide de ceux qui en sont sortis comme Luzer Twersky (Shulem, le mari de Meira). Il va ainsi assister à des cérémonies de Shabbat, aller choisir les costumes pour le personnage de Meira dans des boutiques spécialisées, costumes qui seront "validés" par les plus curieux sur le tournage. Ne pouvant pas assister à toutes les scènes de la vie quotidienne, Luzer était d'une très grande aide et l'histoire s'inspire de son vécu dans la communauté hassidique de Brooklyn à New York, et de ses envies d'autre chose. Il a laissé deux enfants en s'en allant définitivement, car une fois dehors, impossible de revenir. Il a été repéré par Maxime Giroux grâce à des courts-métrages et a gagné plusieurs prix d'interprétation dont un pour ce film. 

Le réalisateur raconte son histoire à travers Meira, car les femmes sont plus intéressantes et énigmatiques pour lui. Hadas Yaro interprète Meira, cette femme qui n'a pas eu d'enfance et a qui a appris à être une épouse et mère très tôt et qui voudrait retrouver cette innocence et son adolescence volée. Félix (Martin Dubreuil) est un éternel adolescent qui ne prend rien au sérieux et ne semble pas avoir de projets. Il va rencontrer Meira et ils vont tomber sous le charme l'un de l'autre. 

Avec Félix, Meira va apprendre à libérer ses émotions en commençant par regarder un homme dans les yeux, à explorer son corps en essayant un jean pour la première fois. La ville de New York, où ils font un séjour très bref, est aussi symbole de liberté pour le couple naissant, notamment dans la "scène d'amour" où ils se retrouvent dans une chambre d'hôtel. Félix caresse les vrais cheveux de Meira (les femmes doivent se couvrir les cheveux par pudeur). Aussi simple que cela puisse paraître, c'est une scène très sensuelle et intime, la seule "scène de sexe" comme la considère le réalisateur. 

Au final, là où on attendait une comédie romantique, on trouve une histoire sans clichés où l'on se sent comme des ados qui découvrent l'autre. Le triangle amoureux Félix/Meira/Shulem fonctionne très bien. L'ultime geste d'amour de Shulem pour sa femme est d'une finesse et d'une générosité presque jamais vu, tellement la simplicité de la scène force l'admiration. Un plan fixe sur Félix et Shulem assis à une table, pour parler d'homme à homme. A la fin, Shulem lit la lettre du père défunt de Félix qui s'adresse en définitive à tous les personnages. Il faut savoir que cette scène clé devait être coupée au montage.

Très inattendu aussi, la fin ouverte avec toutes les questions qu'elle soulève. Maxime Giroux ne pouvait pas finir son film sur un simple happy ending, c'est plutôt une sorte d'hommage ou de pensée à tous ceux qui ont osé quitter leur communauté, leur famille, leurs valeurs, leurs traditions, leur spiritualité. N'ayant plus de repères, certains se suicident, se prostituent, deviennent SDF car pas d'éducation. Toutes les règles et le cadre qu'imposait la communauté sont avalés puis recrachés par une société trop libre et dépendante de tout. 

J'ai eu la chance d'assister au débat de fin de projection et à la table ronde en présence du réalisateur, ce qui était très enrichissant et intéressant. L'échange sur le film m'a beaucoup éclairé sur le point de vue de Maxime Giroux, et ça fait toujours plaisir de rencontrer une personne aussi généreuse et ouverte.

Merci à Anaïs pour la projection et la table ronde ;) 

NOTE DU BLOG : 

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire